Héros de chez nous – Martin Richer: Développer le ski de fond dans les cours d’école grâce à la Coupe des Fondeurs
L’ampleur, la portée de ce qu’il a entrepris il y a 25 ans continue d’étonner Martin Richer.
« Certains parents, dit-il en riant, me font des blagues : “Hé, Martin, tu me coûtes cher !”
“Depuis la Coupe des Fondeurs, toute la famille fait du ski !”.
Je ne le prends pas mal.
La taquinerie est bienveillante.
Tout le monde en ville le sait, les trois week-ends de la Coupe des Fondeurs, courses de ski de fond pour les enfants d’âge scolaire, sont devenues un élément incontournable de la vie hivernale à Saint-Jérôme, une ville de 80 000 habitants située à cinqante kilomètres au nord-ouest de Montréal, sur la rivière du Nord.
Il y a 37 ans, Marc Desjardins, un enseignant en éducation physique de la région, a eu l’idée de relier les écoles locales à une autre de ses passions, le club Fondeurs-Laurentides.
Suite à la retraite de M. Desjardins de la commission scolaire, c’est Martin Richer qui a repris le flambeau de la Coupe des Fondeurs.
« À l’époque de la retraite de Marc, j’étais enseignant en éducation physique et je faisais du ski », se souvient Richer. « Il m’a donc demandé : “Martin, tu veux prendre ma place ? Je vais te préparer. ” »
« J’ai dit : “Ce serait un honneur de perpétuer la tradition. ”
« Je le pensais vraiment.
« J’ai repris l’idée de Marc, et avec le temps, les progrès technologiques et la plus grande visibilité du ski – Alex Harvey et les Jeux olympiques de Vancouver, c’était plus populaire qu’avant – ça s’est développé.
« Au début, cinq ou six écoles participaient aux courses, soit environ 50 enfants. Maintenant, nous avons presque 30 écoles chaque année, et environ 600 enfants dans presque toutes les courses.
« Près de 1 800 enfants participent chaque année.
« C’est assez phénoménal.
«Puisque Saint-Jérôme est proche de Morin Heights, l’endroit où le ski de fond a débuté au Canada, nous nous sommes demandé pourquoi Saint-Jérôme ne pourrait pas être le meilleur endroit au Québec pour skier ».
Le fondateur de la Coupe, M. Desjardins, continue de donner un coup de main à la communauté du ski, en tant que responsable des départs pendant les trois fins de semaine de l’événement et en travaillant à la Coupe du Québec organisée à Morin Heights.
La croissance de ce projet qu’il a imaginé a surpris même son fondateur.
« Tous les samedis, Marc me regarde et me dit : “Wow ! C’est devenu énorme !” Il n’aurait jamais pensé que ça deviendrait aussi important.
« C’est l’une des plus grandes, sinon la plus grande, des courses pour les enfants d’âge scolaire du pays.
« On a fait un bon travail dans les écoles, en rencontrant tous les enseignants d’éducation physique pour leur dire : “On a quelque chose de plus que le basket, le hockey ou le volley. Nous avons le ski nordique. Et tous les profs d’éducation physique ont répondu : “Oui, oui, mais nous n’avons pas d’équipement”. »
« Alors nous sommes allés voir les fabricants, Fischer, Madshus, Rossignol. Et Rossignol a dit : “Je crois en votre projet. ”
« Ce fut un moment décisif.
« Jacques Vincent, le représentant de Rossignol Canada pour le ski de fond, nous a dit : “Martin, Marc, je serai là avec vous “.»
« Donc, ils ont vendu de l’équipement aux écoles au prix coûtant. Les écoles achetaient, disons, 10 morceaux d’équipement une année, 10 l’année suivante, et assez vite ….
« C’est devenu une perche formidable. Sans (Vincent), tout aurait été très difficile. Et mes patrons à la commission scolaire, ils y croyaient aussi. Ils auraient pu investir dans le basket, la natation, etc., mais il y a 20 ans, ils ont regardé le ski de fond et ont dit : “Oui, allons-y”.
Maintenant, les écoles partagent l’équipement. Les participants n’ont rien à débourser. Tous les enfants d’âge scolaire sont les bienvenus, peu importe leur niveau de ski. Les enseignants d’éducation physique de la ville participent tous à l’organisation, tout comme les parents. Faire du ski dans les cours d’école pour garder le sport vivant est devenu une habitude locale.
Constatant la croissance de l’intérêt pour le ski de fond, la Ville de Saint-Jérôme a fait l’acquisition d’une dameuse PistenBully pour aménager les pistes de ski, pour remplacer le Ski-Doo équipé d’un traceur à l’arrière.
Des entreprises de la région – des banques, une entreprise alimentaire, une entreprise de meubles – ont décidé d’apporter leur soutien en tant que commanditaires.
Les enfants et le sport en bénéficient.
La personne la plus remarquable à avoir bénéficié du programme de la Coupe des Fondeurs est sans doute Cendrine Browne, qui s’est retirée de la compétition en 2022, à l’âge de 28 ans, après une carrière internationale de 10 ans en ski de fond.
« Cendrine est le meilleur exemple de la façon dont le plan peut fonctionner », convient Richer. « C’était une petite fille dans une petite école près de Saint-Jérôme. Elle était déjà allée skier avec sa mère, mais pas tant que ça.
« Cendrine a commencé à skier avec l’école. Elle est venue à la Coupe des Fondeurs et a gagné la première course à laquelle elle a participé.
« Elle avait visiblement du talent.
« Tout de suite, nous lui avons dit : “Pourquoi ne pas intégrer un club ? Il y a un club à Saint-Jérôme, Fondeurs Laurentides, alors vas-y. ” »
« Cendrine a commencé à s’entraîner avec le club… et on connaît la suite. »
La suite, ce sont des participations aux Jeux olympiques d’hiver à Pyeongchang, en Corée du Sud, et à Pékin, en Chine, cinq départs en championnat du monde et 76 courses en Coupe du monde.
Browne a également reçu le prix commémoratif John Semmelink en 2022, décerné chaque année à l’athlète canadien de sports de neige qui a le mieux représenté le pays sur la scène internationale grâce à son intégrité, son comportement et ses compétences. Aujourd’hui, même après sa retraite, elle travaille pour Ski de fond Québec, où elle prépare la prochaine génération de skieurs.
Elle est le genre d’exemple concret qui contribue à la mise en œuvre du programme.
« Il y a d’autres exemples que Cendrine, note Richer, et nous en sommes fiers. Nous voyons des enfants de cinq ou six ans, qui n’ont peut-être jamais skié de leur vie, ils commencent, ils tombent amoureux de ce sport, et on ne sait jamais ce qui va se passer. »
Sans surprise, la Coupe annuelle de cette année s’est avérée un succès retentissant, restant fidèle aux fondements établis par Marc Desjardins et mis à jour par son successeur.
« Parfois, dit Richer en riant, les gens viennent me voir et me disent : “Hé, Martin ! J’étais à la Coupe des Fondeurs en – disons – 1992” et ils viennent avec leurs enfants. Et aussi, certains qui étaient là à la fin des années 80 viennent avec leurs petits-enfants !
« Nous avons donc des skieurs de la troisième génération ».
Invité à réfléchir à son implication, à la croissance exponentielle de l’événement et à l’amour pour le ski profondément ancré dans sa communauté, Martin Richer s’attarde un moment avant de répondre.
« De quoi suis-je le plus fier ? Eh bien, je dirais le fait que les gens qui ont commencé le sport avec la Coupe des Fondeurs il y a des années – peut-être des décennies – continuent à skier.
« Cette longévité que peut engendrer le ski est merveilleuse.
« Ces personnes me disent : “La Coupe des Fondeurs m’a donné la chance de dire : “Oui, je veux skier pour le reste de ma vie”.
« Ils le font et ils le feront.
« C’est incroyable, non ? »