D’athlète à entraîneur – Partager sa sagesse et célébrer les victoires hors de la piste
Naturellement, après avoir raté sa chance à Pyeongchang en 2018, et par le fait même l’apogée du rêve d’une vie, par un soupir, un battement de cœur, une minuscule seconde, Maya MacIsaac-Jones a redirigé son attention vers une seule chose.
Février 2022.
Le centre de ski nordique et de biathlon de Zhangjiakou et les XXIVes Jeux olympiques d’hiver.
« Pour l’instant, c’est sûr que ma course est ma priorité, » dit-elle.
« Beijing est quelque chose qui me passionne beaucoup. Être aux Jeux olympiques, c’est mon but ultime. C’est le but ultime de tous. »
Sur le long terme, dans l’idée de pousser plus loin la carrière d’entraîneure, elle travaille pour obtenir sa certification d’entraîneure tout en continuant la compétition.
« J’aime beaucoup en apprendre plus sur les gens et comment ils réagissent à différentes situations, » explique MacIsaac-Jones. « Avec les Olympiques l’an prochain, je travaille comme entraîneure seulement un jour par semaine au Foothills Nordic à Canmore. Ça ne perturbe pas mon entraînement et ça me donne même plus d’énergie dans mon lien avec les athlètes.
Ça va vraiment bien et ça m’aide dans mes objectifs personnels. Encore aujourd’hui, j’ai plein d’idées de choses que je voudrais faire lorsque je vais arrêter la compétition, mais je me suis vraiment intéressée à l’entraînement en tant que jeune athlète. Je pense que devenir entraîneure serait une opportunité incroyable. »
Elle sera excellente, prédit Stephen Novosad, gestionnaire du cheminement des entraîneurs de Nordiq Canada.
« Quand je vois toute la générosité de Maya, c’est tout simplement incroyable, » s’exclame-t-il. « Il faut faire attention à ne pas en abuser au point où elle est dans son développement. »
« Si on prend l’exemple de Graham Nishikawa, il a aussi fait la transition d’athlète à guide pour Brian McKeever en ski paranordique, puis entraîneur. Il a reconnu qu’il avait quelque chose à offrir. »
« Bien sûr, il y en a d’autres. Ces personnes partagent une passion pour ce qu’ils font et font preuve de beaucoup d’humilité dans leur apprentissage.
Ils ont leur travail à cœur et c’est très inspirant. »
Pendant la Semaine nationale des entraîneurs au Canada, de nombreux athlètes et anciens athlètes dans tous les sports possibles et imaginables rendent hommage à ces hommes et ces femmes, les mentors qui les ont inspirés, en redonnant de la même façon.
Dans le cas de MacIsaac-Jones, la motivation d’être une leader, d’instruire, d’informer, est inspirée de John Jaques, entraîneur de plusieurs athlètes à Canmore et entraîneur de biathlon pour l’équipe nationale paranordique.
Tout comme la médaille d’or olympique au sprint individuel de Chandra Crawford en 2006 à Turin, en Italie, a fait de MacIsaac-Jones une skieuse, Jaques l’a aidé à trouver sa passion pour aider les autres.
« J’ai travaillé avec lui pendant près de 10 ans à Canmore et il était un entraîneur très créatif, très honnête avec ses athlètes, et il nous encourageait vraiment à penser par nous-même, » dit la native d’Athabasca, AB, âgée de 26 ans, qui commence sa quatrième année au sein de l’équipe nationale de ski senior.
« Il m’a beaucoup fait réfléchir à mon entraînement et dans ma progression pour devenir une athlète senior. J’ai eu la chance de travailler avec des entraîneurs qui m’ont aussi beaucoup encouragée à penser par moi-même.
« Au cours des dernières années, j’ai travaillé avec Chris Jeffries, Erik Braten, et présentement je suis avec Julia Ystgaard. Travailler avec ces personnes a alimenté mon intérêt dans le côté athlète du sport, mais aussi sur l’impact à long terme qu’un entraîneur peut avoir. »
Robin McKeever, entraîneur-chef de l’équipe paranordique, Olympien et ancien guide de son frère Brian, souligne que la transition d’athlète à entraîneur ne convient pas à tous.
« La chose la plus difficile pour les athlètes qui deviennent entraîneurs est de comprendre les différences dans la psychologie, » explique-t-il. « En tant qu’athlète, il faut être assez égoïste, puis il faut devenir extrêmement généreux.
Les athlètes qui réussissent à ne pas être égoïstes font généralement d’excellents entraîneurs, et ceux qui sont très égoïstes comme athlètes n’y arrivent pas. Ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas changer! »
« Il faut définitivement arriver à gérer plusieurs types de personnalité. Ça prend un quotient émotionnel élevé pour gérer différentes personnes de la bonne façon. »
Lorsque McKeever a abandonné son propre rêve olympique, il est resté comme guide pour son frère puis, de façon quelque peu inhabituelle, il est devenu entraîneur en 2003.
« Après les Olympiques de 2002, j’ai décidé de faire une autre année. Je n’avais pas fini de guider Brian, mais c’était terminé pour l’équipe nationale, » se souvient-il. « J’allais avoir un enfant et j’avais des offres d’emploi avec Fischer, un fabricant de ski, et Brooks, un fabricant de chaussures. Je me suis dit que je n’aurais plus rien en lien avec le sport, sauf l’équipement.
C’est à ce moment que Foothills Nordic Ski Club m’a appelé pour me demander si j’étais intéressé à soumettre ma candidature pour le poste d’entraîneur-chef. Je leur ai dit non. Puis j’ai réfléchi pendant une journée. Lorsqu’ils ont rappelé pour me demander si j’étais certain, car ils avaient entendu dire que je ferais un bon entraîneur, j’ai dit : “Mais non, je ne sais pas ce que je fais, bla bla bla…”, puis : « D’accord, je vous envoie mon CV.” »
Et….
« C’est la meilleure décision que j’ai prise de toute ma vie. »
Pour Nikishawa, qui s’habitue à son rôle en tant qu’entraîneur de développement para, c’est le calme et l’attitude autonome de son premier mentor, Alain Masson, qui a inspiré son amour de l’enseignement.
« Je ne serais pas là où j’en suis aujourd’hui sans lui, » reconnaît-il. La philosophie d’Alain était : « Si tu veux te rendre là, je vais te montrer comment faire. Mais ça dépend de toi. Tout vient de toi. Je ne peux pas te faire lever à 6 h du matin. Je ne peux pas te faire sortir à -40. »
« Ça m’a vraiment inspiré. Ça a bien marché pour moi. Oui, il était là comme soutien, mais au final, c’est l’athlète qui doit y croire et travailler fort.
On ne peut pas juste dire à quelqu’un d’aller gagner une médaille d’or. »
Nishikawa continue d’être guide pour le skieur paralympique le plus décoré de l’histoire, son ami Brian McKeever, comme il l’a fait pour les deux derniers cycles paralympiques. Avec l’arrêt des voyages de compétition à cause de la COVID-19 il y a un an, il a commencé à travailler plus étroitement avec la directrice de la haute performance paranordique, Kate Boyd, et Robin McKeever.
« Je m’implique tranquillement, j’apprends les rouages, » explique-t-il. « De mon point de vue, ça a été un grand succès.
« J’ai fait des compétitions de ski toute ma vie et je suis dans la haute performance depuis 20 ans. J’ai tellement vécu de choses en tant qu’athlète, alors j’apprécie vraiment maintenant de travailler avec d’autres athlètes sans chausser les skis. Je me fie sur ce que j’ai appris dans le sport et grâce à mon expérience pour les aider.
« Je comprends ce qu’ils vivent. Je l’ai vécu aussi.
« Quand ils me disent : “Je suis tellement fatigué, j’ai l’impression que mes jambes sont en plomb”, je connais cette sensation. Je l’ai vécu aussi. Je peux leur dire : “C’est normal. Pas de problème. Ne t’inquiète pas.”
« J’arrive à bien les appuyer de cette façon.
« Lorsque j’essaie de leur dire quelque chose, de modifier leur technique, leur enseigner ou leur montrer quelque chose de nouveau, les aider à battre un nouveau record personnel, c’est un grand défi, mais c’est très gratifiant. Ce n’est pas seulement après un bon résultat ou une médaille d’or qu’on se sent bien comme entraîneur. C’est aussi en voyant les percées au bord de la piste, l’amélioration graduelle, les moments où on se dit “Wow, ils ont compris!”
« On se sent bien quand on les aide à s’améliorer ou à modifier leur façon de faire pour aller plus vite. Même mieux que bien. Absolument. »
Redonner tout en restant impliqués dans le sport qu’ils aiment et auquel ils ont donné tellement de temps, tout en partageant les leçons, dans le sport ou dans la vie, qui les ont aidés en cours de route.
C’est gagnant-gagnant.
« Les meilleurs entraîneurs sont très déterminés et très motivés, et ils sont prêts à donner beaucoup d’eux-mêmes, » souligne MacIsaac-Jones.
« Ils n’ont pas le choix. Être entraîneur ne se fait pas sur un horaire de 9 à 5.
« Quand j’entraîne les autres, j’essaie de partager les choses que j’ai apprises et auxquelles je crois, comme l’autonomie des athlètes.
« C’est très satisfaisant de donner aux athlètes les outils et les connaissances dont ils ont besoin pour être capables de prendre leurs propres décisions, pour qu’ils connaissent bien leur corps et leur esprit.
« On en retire beaucoup. J’espère qu’eux aussi. »