Les athlètes d’Équipe Canada s’attaquent au monde en mode COVID-19 une foulée à la fois

by Rita Mingo
26 Fév, 2021

Passer du temps avec les coéquipiers et les adversaires d’autres nations pendant une compétition internationale fait généralement partie des moments forts de l’expérience.

Pendant la pandémie de COVID-19, ce n’est plus le cas.

« Je me souviens très bien, à notre troisième ou quatrième soir ici, quand on a commencé à manger au buffet avec les autres équipes, je me souviens d’être entré dans la pièce… okay, on mange dans la même pièce que trois ou quatre autres équipes, tout le monde au même buffet! » se souvient Xavier McKeever, membre de l’équipe canadienne qui a participé aux championnats du monde juniors de ski nordique en Finlande en février.

« J’ai eu un petit moment de panique, mais il faut se rappeler que tout le monde a été testé. En théorie, c’est sécuritaire. Il faut se concentrer sur les choses qu’on peut contrôler, car au final, nous sommes tous dans le même bateau. »

La saison de ski de fond a été très différente pour les athlètes canadiens. Avec les restrictions provinciales en place, ils n’avaient pas de compétitions à domicile et ont dû s’adapter à l’entraînement. Pour ceux qui ont eu la chance de voyager en Europe pour participer à des compétitions, les mesures en place étaient intimidantes.

« Pour moi, le plus grand défi avec toute cette logistique, c’est que si on veut réagir à quelque chose ou changer les plans, c’est très difficile, » indique Joel Jaques, le chef d’équipe.

« Même pour une équipe de championnats du monde juniors qui voyage en Europe, on ne savait pas trop ce qui allait arriver avec les restrictions changeantes en place au Canada. Si les vols sont annulés, on ne peut pas simplement réserver un autre billet pour le lendemain. Il faut organiser les tests de dépistage de COVID, dont les résultats ne sont valides que 72 heures, avant de pouvoir voyager. »

« C’est la même chose si on veut faire venir du personnel rapidement. Si la personne que l’on trouve ne passe pas son test de dépistage prédépart parce qu’elle a déjà eu la COVID, ça prend au moins quatre jours avant qu’une autre puisse décoller du Canada. Le délai entraîné est énorme pour nous. »

C’est la nouvelle réalité des voyages à l’étranger pour participer aux compétitions en temps de COVID.

Jaques et son équipe ont récemment été à Vuokatti, en Finlande, pour les championnats du monde de ski nordique juniors et U23. Une fois sur place, les différents protocoles en place pour chacun des pays ont causé quelques maux de tête. Par exemple, le service de contrôle frontalier doit recevoir tous les documents avant le laisser entrer quelqu’un dans un autre pays, ce qui signifie d’autres tests.

« Tout le monde est testé avant de quitter le Canada, ils sont testés à nouveau en arrivant et avant de commencer la compétition, et une fois de plus en quittant le pays, » explique Jaques. « Je suis en Europe depuis deux semaines et demie et j’ai été testé neuf fois! »

Un plan détaillé mis en place par Nordiq Canada a été la marche à suivre pour s’assurer que les athlètes et le personnel sont en sécurité et confortables lorsqu’ils vivent, s’entraînent et compétitionnent dans la bulle de la FIS.

« Nous avons créé des groupes au sein de l’équipe, » explique la leader Julia Ystgaard, entraîneure de haute performance en Alberta. « Toutes nos réunions se déroulent en respectant la distanciation ou en mode virtuel. Le personnel, les athlètes masculins et les athlètes féminines forment trois groupes différents. »

« Les seuls contacts permis avec le personnel sont à l’extérieur et nous essayons de les minimiser le plus possible. Si nous avons un cas positif, ce n’est pas toute l’équipe qui va être infectée. Nous avons eu beaucoup de réunions avant de partir en Europe avec l’équipe, nous leur avons longuement parlé de la COVID, de ses effets et conséquences. L’équipe a vraiment bien fait les choses pour réduire les risques. »

Ystgaard était également avec l’équipe canadienne à Lahti, en Finlande, pendant les épreuves de Coupe du monde, où ils ont vécu l’incertitude.

Deux membres de l’équipe avaient contracté la COVID bien avant le voyage en Europe et ils n’étaient plus malades, mais continuaient à tester positif. Toute l’équipe a dû rester en quarantaine jusqu’à ce qu’ils puissent obtenir des documents indiquant que les athlètes n’étaient plus infectés.

« Il y a tellement de personnes impliquées dans les compétitions et avec tous les règlements, si vous avez un cas spécial comme nous avons eu à Lahti, il faut contacter beaucoup de personnes avant que tout se passe bien. »

« À Lahti, nous pensions que nous ne pourrions pas participer, et c’était incertain aussi pour la fin de semaine suivante en Suède. Puis, tout d’un coup, nous avons eu les bons papiers et nous étions prêts à courser. C’était vraiment un changement de mentalité rapide pour les athlètes, mais ils l’ont très bien géré. Ils savent que c’est impossible que tout se passe à la perfection, mais ils s’adaptent facilement et ils sont patients. »

Il y a du désinfectant pour les mains dans les chambres et dans la salle de fartage, tout le monde porte un masque à l’hôtel et pendant le transport. Tout le monde essaie de bien appliquer ces mesures et de faire sa part pour réduire les risques, sans marge de manœuvre.

En voyageant en Suède, l’équipe de Coupe du monde a dû s’adapter à un autre pays qui a ses propres mesures contre la COVID-19 pendant un mini stage d’entraînement pour se préparer aux championnats du monde de ski nordique seniors à Oberstdorf, en Allemagne.

« C’est ce qui rend les voyages si excitants maintenant, » dit Ustgaard.

« On ne sait jamais ce que le lendemain nous réserve. La pandémie a commencé depuis un bon moment, alors je crois que nous sommes habitués à ne pas pouvoir nous préparer pour beaucoup de situations. Nous essayons de planifier autant que possible, mais nous sommes toujours prêts à nous adapter, peu importe le changement. Je crois que c’est ce qui est le plus important quand on se déplace beaucoup. »

Pour les athlètes qui aiment avoir une routine et un horaire précis, cette « nouvelle normalité » a demandé un certain temps d’adaptation.

« Ce qui est le plus stressant selon moi, c’est de ne pas avoir le contrôle sur tout ce qui arrive, » déclare Katherine Stewart-Jones, 25 ans, d’Ottawa.

« Nous voyageons dans les aéroports avec des étrangers et nous n’avons pas le contrôle sur notre alimentation. C’est définitivement stressant. J’ai fini par me dire qu’il y a certaines choses qu’on peut contrôler et qu’il faut être très prudent. J’étais encore plus inquiète par rapport à la COVID avant de commencer les courses. Une fois les courses commencées, ça demande toute notre énergie. »

« Ça a vraiment été un gros ajustement de ne pas vraiment savoir quelles courses vont avoir lieu, même à quelques semaines d’avis, » ajoute Dahria Beatty, une Olympienne de 26 ans de Whitehorse, au Yukon. « Il faut essayer de rester calme et de suivre la vague. Pour des athlètes qui aiment planifier et être en contrôle, c’est difficile. »

« On a besoin de plus de concentration et d’aide cette année. Surtout pendant la saison de compétition, les hauts et les bas émotionnels ont été plus intenses que les autres années, mais il faut utiliser les mêmes outils que depuis toujours en tant qu’athlète : on s’assure d’utiliser des stratégies pour se concentrer sur ce qu’on peut contrôler. Ça nous prend quelques rappels, car ce n’est pas naturel pour nous. »

Une autre grande interdiction de la saison est de fraterniser avec les athlètes des autres équipes.

« En étant sur le circuit de Coupe du monde, avec le temps, on se fait des amis d’autres pays, » dit Beatty. « Cette année on ne peut pas communiquer et passer du temps avec les amis qu’on voit habituellement en hiver. On est avec notre propre équipe, sauf pendant les courses. C’est vraiment différent. Nous avons vraiment une bonne dynamique d’équipe et nous pouvons passer encore plus de temps ensemble, alors ce n’est pas une mauvaise chose. »

Bien sûr, il y a également les inévitables tests. Ça peut sembler comme une corvée, mais en sachant que les autres autour d’eux sont en santé, les athlètes ont une inquiétude en moins.

« Au final, tout le monde est d’accord pour dire que ça vaut la peine d’avoir la chance de participer à des compétitions et de s’assurer que tout le monde est en sécurité et que personne n’a de problème avec la COVID, » explique McKeever, 17 ans, après son retour à la maison à Canmore.

« Les tests sont inconfortables, surtout avec le frottis nasal, » déclare en riant Beatty, « mais c’est 10 minutes d’inconfort pour une bonne raison et ça nous permet de faire des compétitions et que la saison ait lieu. »

C’est le sentiment général parmi les athlètes canadiens : ils sont heureux d’avoir la chance de participer aux compétitions alors que d’autres sports doivent rester sur la touche et attendre une amélioration de la situation. Ils sont prêts à fait un petit sacrifice en plus pour en profiter.

« J’étais vraiment content de pouvoir y aller et courser, » dit McKeever. « Mon objectif principal pour la saison était d’aller aux championnats du monde juniors. C’était une expérience différente, mais c’était vraiment intéressant à vivre. »

L’horaire de Coupe du monde continue de voir des annulations en raison de l’évolution de la pandémie et des mesures mises en place par les différents pays, mais le prochain arrêt d’Équipe Canada est à Oberstdorf, en Allemagne.

« Les choses changent tout le temps, » commente Beatty. « Il faut prendre les choses un jour à la fois et être reconnaissant pour les opportunités de course qu’on a. »

« Ça nous fait vraiment apprécier la possibilité de participer aux courses. Après trois fins de semaine de Coupe du monde, on se sent vraiment chanceux d’être là. »